L'année de grâce
Imaginez une communauté dans laquelle les femmes sont réduites à l'état d'esclaves soumises aux hommes. L'année de leur 16 ans, les jeunes filles partent pour L'année de grâce, dont il ne filtre rien de générations en générations. Mais il n'en sort rien de bon vu l'état dans lequel celles de l'année précédente reviennent... ou pas. Tout est orchestré par les hommes dans un climat de peur et de superstitions : cette année est soi-disant nécessaire pour que les jeunes filles éloignent la magie qui les habitent et pour revenir encore plus obéissantes à leurs maris, qui les ont choisies pour certaines lors de la cérémonie du voile la veille de leur départ. Pour les autres, à leur retour, ce ne sera pas le mariage, mais les travaux aux champs ou la prostitution.
Tierney est de celle-là : ses deux plus grandes sœurs en sont revenues et là, c'est son tour. Son destin bascule lorsqu'elle est choisie par un jeune homme qu'elle ne soupçonnait pas le moins du monde, alors qu'elle refuse le mariage. Mais dans cette communauté, on obéit ou on est pendue en place publique devant tous.
C'est le départ pour ce camp sur cette île désolée et à l'arrivée, c'est bien pire que ce que ces jeunes filles n'auraient jamais pu imaginer : eau croupie, dortoir délabré, aucune nourriture mais surtout les braconniers à l'extérieur du camp. Si jamais une jeune fille tombe entre leurs mains, ce sont ses cris qu'il faut supporter pendant des heures interminables jusqu'à sa mort. La rivalité, la haine même, s'invitent très vite dans ces conditions de survie. La force du groupe, ses alliances supposées ou feintes, se surajoute à ce climat en permanence attisé par l'une d'entre elles, envoûtée littéralement par cette magie dont on les serine depuis toujours. On se croirait dans une secte menée par le diable en personne.
Le caractère bien trempé de Tierney, sa débrouillardise, son sens de l'adaptation vont lui permettre de surmonter bien des épreuves (et le mot est faible !). Il faut dire que ses parents lui ont donné des armes pour.
Il y a dans ce roman des pages terribles mais surtout une lumière qui se fraie un chemin : une prise de conscience de l'héroïne de ce machiavélisme fabriqué de toutes pièces. Elle ne sera pas seule : un homme va l'aider à lui ouvrir les yeux, et bien plus. Ces pages semblent comme irréelles tant leur beauté parait incongrue dans toute cette horreur.
La fin, magnifique de sororité, révèle cette magie qui fait tant peur aux hommes.
Je n'en dirais pas plus tant ce roman m'a interpellée, sonnée, interrogée dans mon corps de femme.
Le mot de l'autrice éclaire le lecteur sur la genèse de ce roman et j'en ai été à la fois surprise et fascinée.
Mais quand même une question me taraude : à partir de quel âge le proposer ? Si vous l'avez lu, qu'en pensez-vous ? Je me pose rarement cette question mais là, si.
Un roman d'apprentissage glaçant mais passionnant.
Quelle lecture en effet ! Moi aussi, ce roman m'a marquée. Dans notre bib, nous l'avons mis en secteur adulte, donc à partir de 14-15 ans. Vu la violence de certaines scènes, ça ne me semble pas destiné à de trop jeunes ados. Après, comme toujours, tout dépend de la maturité affective de chacun, mais bon... Il y a quand même des passages très durs et dérangeants.
RépondreSupprimerEn y repensant, je trouve juste dommage que l'autrice ait imaginé que l'année de grâce se passait toujours aussi mal, même si tout pousse les filles à ces comportements. Heureusement que la fin laisse entrevoir un peu d'espoir.
merci beaucoup de ta réponse : je vais le mettre en adultes aussi. J'ai tremblé comme jamais en le lisant, surtout au début. Mais peut-être que les ados ne ressentent pas de la même façon.
SupprimerIl m'intrigue, bien envie de le lire pour me faire mon avis !
RépondreSupprimeroui, oui lis-le et tu me diras !
SupprimerJ'hésitais à le lire mais ta chronique vient de me convaincre de foncer. Merci
RépondreSupprimerJ'ai hésité aussi mais je ne regrette pas !
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