Plein gris

Un huis-clos angoissant sur un voilier qui commence par un cadavre flottant le long de sa coque....

Celui de Clarence, le leader charismatique du groupe de cinq adolescents qui a embarqué sur le Céladon, pour ce qui devait être une croisière de rêve vers l'Irlande, gagnée de haute lutte auprès des parents et grands-parents.

Ce qui va corser ce début déjà glauque, c'est l'arrivée d'une tempête d'une force inégalée et le voilier se dirige droit dessus.

Un roman catastrophe de grande envergure !

Sa construction qui alterne récit au présent et au passé permet au lecteur de reconstituer peu à peu la psychologie des personnages et le contexte de leur amitié, en place vraiment privilégiée, servie par cette écriture hyper-cinématographique, qui sait si bien manier le vocabulaire et les attitudes marines. 

C'est Emma qui raconte. Et elle raconte tout : à travers, c'est la fragilité adolescente qui transparait, les luttes d'égo, le désir sexuel, l'attirance, la force du groupe mais aussi ses rancœurs. Elle n'occulte rien, sème des indices qui font qu'on a envie de lui dire qu'il aurait fallu stopper certains comportements avant....mais c'est ainsi, le groupe est la priorité, certaines individualités s'effacent.

D'avoir placé ce récit au milieu d'une tempête lui donne une force décuplée car chacun est alors face à ses peurs les plus enfouies, ses doutes, ses responsabilités, son courage ou sa lâcheté.

C'est un roman qui pose aussi avec une acuité extrême la question du secret validé par un groupe mais aussi les zones d'ombre de tout individu, qui se dévoilent parfois dans des circonstances particulières. Marion Brunet brosse le portrait d'adolescents, dont l'amitié se transforme insidieusement en autre chose qu'ils ont à la fois du mal à maitriser, mais dont ils sentent que ce glissement est inévitable.

J'ai eu la chance de le lire en avant-première (Merci ComJ et en particulier Marie !) et je rédige mon avis seulement maintenant (sortie hier) : je m'aperçois qu'il a laissé une empreinte forte dans mon esprit tant la richesse des thèmes qu'il aborde est menée de front avec subtilité. Merci capitaine Brunet pour ce récit en apnée qui m'a fait souvent dresser les poils sur les bras !

Plein gris
Marion Brunet
PKJ

Commentaires