Double jeu

Quentin. Ado de 16 ans, de la banlieue. Embarqué avec Dylan et sa bande dans des trafics durant son année de seconde. Parents convoqués. Lui aussi. Une seconde chance ? Intégrer en première L le lycée Clémenceau, très huppé, à l'autre bout de la ville et se refaire. Un autre monde pour Quentin. D'autre codes, un autre langage. Il ne cherche pas à s'intégrer. Reste en retrait. Jusqu'à sa rencontre avec Madame Fernandez. Une prof de français atypique. Qui le sonde. Qui l'intrigue. Elle dirige de main de maître l'option théâtre du lycée. Quentin est pressenti pour le rôle principal. Bien malgré lui. Une pièce : "La ménagerie de verre" de Tennessee Williams. Tom, le personnage principal, c'est lui mais pas tout à fait. Une année difficile pour Quentin : entre son monde d'avant et celui de maintenant, un gouffre. Pourtant, il ne veut ni de l'un ni de l'autre. La vie, l'avenir, lui font peur. Ce que deviennent les adultes, avec leurs rêves de jeunesse enfouis, le confort de leurs habitudes, leur obéissance aux contraintes, sont comme un vide dans lequel il refuse d'être aspiré. Et puis, il y a sa petite sœur. La scène sera son espace de liberté avec son angoisse aussi mais au moins, celle-là, il l'aura choisie...

Les romans de Jean-Philippe Blondel ne laissent jamais indifférents : à force de côtoyer des adolescents au quotidien dans son travail d'enseignant, il sait les sonder mieux que personne. Ce que j'aime, c'est qu'il sait garder à la fois leur révolte et leur besoin d'émancipation à l'état brut, mais toujours il les mène sur le chemin de leur liberté. Ce roman nous dit aussi que le choix existe, que nous ne sommes pas conditionnés par nos origines sociales, que parfois, de belles rencontres surgissent et nous aident à accoucher de nous-mêmes comme une autre naissance.

Les dialogues sont toujours aussi percutants, l'histoire concise et bien menée : l'auteur va a l'essentiel. La construction en trois actes et scènes, comme au théâtre, permettent au lecteur de bien se repérer dans cette année de transition pour Quentin. Il en vient à penser aussi s'il n'est pas en train d'écrire son propre rôle dans ce carnet qu'il a commencé, mais laissé tombé et repris durant cette année scolaire charnière.

Double jeu : "je" peut-être parfois un autre, et au théâtre, jouer, c'est seulement jouer...
Un apprentissage.

C'est un roman terriblement touchant et éblouissant sur la part d'ombre et de lumière de chacun de nous avec cette acuité particulière de l'adolescence.

Mes quatre enfants font du théâtre et pour chacun d'eux, le chemin n'a jamais été le même pour s'exposer sur scène...

Retrouvez l'avis de Bouma-Un petit bout de (Bib)liothèque et son interview de l'auteur sur A l'ombre du grand arbre
Et l'avis de Céline-A lire au pays des merveilles

Double jeu
Jean-Philippe Blondel
Actes sud junior

Commentaires

  1. une belle lecture pour toi aussi à ce que je vois...
    à quand tes 4 enfants en même temps sur les planches ???

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    1. Comme toi, j'aime beaucoup l'approche de cet auteur. Mes 2 garçons ont déjà joué ensemble l'année dernière et le refont cette année...Mes filles pas pour tout de suite ! et les 4 ensemble, non, ce n'est pas prévu ! Ce serait bien trop d'émotions...

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