Histoire du garçon qui courait après son chien qui courait après sa balle

Ils sont trois.
Un frère. On ne connaîtra pas son prénom.
Une sœur. Cali.
Jumeaux.
Et un chien : Rubens.
Toujours ensemble.

Le premier passe pour un garçon plutôt maladroit. Sa sœur jumelle comme une jeune fille plutôt brillante. Ils ont développé, comme beaucoup de jumeaux, leur propre langage : le lanvère, les mots mis à l'envers et mélange de verlan. Ils sont fabuleux dans leurs dialogues, plein de vie, de réparties, de mots crus aussi. Ils ne se cachent rien.
Le chien, lui, est obsédé par sa balle. Une idée fixe. Depuis tout petit. Une jaune. Pas les autres couleurs. Pour la suivre, il fugue parfois. Sauf que cette fois-là, il n'est pas revenu. Et qu'il semblerait que sa disparition coïncide avec le malheur qui est entré dans la maison. Cali tombe, a horriblement mal à la tête, perd la vue. C'est un crabe qui dévore son cerveau. Vient alors le temps long et aspirant comme un trou noir de l'hôpital. Le charabia des nombreux spécialistes. Les protocoles de soins. Au milieu de tout ça, une famille dévastée mais des parents d'une rare compréhension sur le lien puissant qui unit leur garçon et leur fille.

Rien n'est prévisible dans la vie. Alors, le garçon se dit que ce n'est pas une coïncidence : s'il retrouve son chien, alors Cali guérira. D'obstination en superstitions, il va se donner cet objectif. C'est sa réponse à lui. Pour atteindre sa sœur. Il a tellement besoin d'elle mais se découvre une volonté et une débrouillardise qu'il ne soupçonnait même pas.

Six mois. Le lecteur suit cette famille pendant six mois, les plus longs de leur vie. Je ne dirais rien de l'issue. Non. Finalement, là n'est pas l'important. Même si cette fin est remarquablement amenée par l'auteur. De la pudeur et de la sensibilité dans ces instants de grâce qui vous étreignent le cœur.

Une écriture très personnelle d'Hervé Giraud, presque parlée, mais qui percute au plus haut point. C'est une écriture qui m'avait déjà interpellée dans son roman Prends ta pelle et ton seau et va jouer dans les sables mouvants, incapable alors de le chroniquer tant je ne suis pas arrivée à mettre des mots dessus. Une écriture sans fioritures, efficace, dépouillée de tout artifice. 

Une belle métaphore aussi de ce que représente la balle du chien : on cherche tous un objectif dans cette vie mais parfois, la balle est déviée et nous aussi. L'inconnu surgit et tout peut être balayé.

J'aimerais en dire beaucoup plus, mais non, je le garde pour moi tant j'ai été remuée par ce roman qui ne tombe jamais dans le pathos mais se place délibérément du côté de la vie.

Histoire du garçon qui courait après son chien qui courait après sa balle
Hervé Giraud
Thierry Magnier

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