La gueule du loup
Lou et Mathilde : deux amies depuis depuis le collège. Tout juste bachelières. Elles s'interrogent sur leur avenir. Que faire après le bac ? La fac ? En attendant, elles partent à Madagascar, se frotter à une nouvelle liberté, s'émanciper des parents, de la pression sociale. Vivre, en profiter quoi, avant le grand saut qui les effraie. Passer à l'âge adulte ? Oui, mais ça veut dire quoi ?
Deux caractères différents aussi qui s'affirment là dans ce pays étranger où les Blancs sont parmi les Noirs, bien visibles et bien étiquetés. Ce voyage, c'est ça aussi : se confronter à la réalité d'une île avec sa culture, ses mœurs, la place de la femme bien loin de la vision occidentale, le contraste très fort entre le dénuement de la campagne et ses traditions et la puanteur de la ville avec ses quartiers mal-famés, la richesse ostensible de certains hommes que rien n'arrête. Le CHOC. Qui met l'une très mal à l'aise et l'autre avide de tout connaitre.
Car ce roman, c'est d'abord deux caractères de jeune filles opposés : Lou plus réservée et timorée et Mathilde toujours prête à tout tenter sans réfléchir aux conséquences. Les circonstances vont faire que ces caractères vont s'affronter, aller au bout de leurs contradictions, mais aussi s'inverser quand l'indicible va arriver sous la gueule de ce loup cynique et sadique au plus haut point. Elles vont alors se soutenir dans l'épreuve au-delà de leurs forces et puiser au fond d'elles ce que plus jamais elles ne pourront faire. Sauver leur peau pour vivre et séparer leurs chemins car le naturel revient toujours au galop.
Il y a des passages dans cette lecture terribles d'effroi. La construction y est pour beaucoup. Plusieurs fois, je me suis trouvée presque physiquement au bord du précipice comme elles, retenant ma respiration, et ressentant physiquement les sévices. Un style aussi qui vous emporte, ne vous laisse aucune chance de vous échapper de la griffe des mots. Hachurés, balancés, crûment. On en sort lessivé comme sous la pluie tropicale. Je l'ai trouvé encore plus fort que le précédent roman de Marion Brunet "Frangine".
Mais finalement plus que le loup de l'histoire, je garde en tête ces deux jeunes filles, amies comme deux sœurs, et dont l'amitié va être éprouvée au-delà de ce qu'elles auraient pu imaginer. Catapultées dans le monde des adultes avec une telle violence que même leur naïveté n'arrive pas à tout arrêter. On n'en sort pas indemne. J'en frissonne toujours...
Un roman à conseiller pas avant 15 ans et encore...
La gueule du loup
Marion Brunet
Sarbacane
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