Retrouver le petit frère

Emma, Sophie et Odilon.
Une fratrie sans histoires, un petit dernier adoré et adorable. Les deux sœurs ont pour habitude d'aller le promener sur le chemin de la forêt, tout près du lac, avec l'autorisation de la maman. Cette fois-là, les filles s'autorisent à aller voir les canards et laissent le petit frère sur le bord de la route. Il y a bien eu cette voiture rouge qui les a dépassées mais elles ne resteront pas longtemps. Promis. A leur retour, la poussette d'Odilon est vide, seule sa petite chaussure  est ce qu'il reste de lui...

Retrouver le petit frère : le titre dit tout. 
Ce sera d'abord l'espoir de le retrouver, caché dans la forêt, lors de cette battue interminable, puis les gendarmes, les interrogatoires, la culpabilité, le silence, les jours qui passent, puis les années, le regard des autres, les soupçons infondés, les langues qui se délient. Tout cela la famille va l'affronter. Avec une dignité exemplaire.

Mais celle pour qui il n' y a pas de résignation possible, c'est Emma, la plus grande. 
Elle vit cette disparition à la fois avec angoisse mais aussi obstination. Elle se met à écrire des chansons pour Odilon pour maintenir un lien invisible avec lui. Elle se fait la promesse intérieure de partir à sa recherche et de le retrouver dès sa majorité.

On suit donc cette famille durant quatre années, quatre années de solitude, de compromis, de résignation où la vie reprend ses droits malgré tout. Les chansons d'Emma évoluent, elle rencontre un jeune homme et devient une jeune femme décidée et volontaire. Il va l'aider à accomplir sa promesse....

Pour une maman, perdre un enfant de cette façon est terrible : j'ai donc lu les premières pages de ce roman avec appréhension. Puis, le personnage d'Emma emplit le livre avec sa détermination, sa maturité, son obsession presque tranquille.

Je ne dirais rien du dénouement.

Le tour de force de l'auteure est de centrer son intrigue puisée dans le fait divers sur les deux sœurs, sur leur différence d'appréciation, l'une qui combat, l'autre qui se résigne. Pas de voyeurisme sur la douleur des parents qu'on sent pourtant palpable au fil des pages. Le propos n'est pas là. A travers cette disparition intolérable, on les voit toutes les deux évoluer sans le petit frère. Sans doute auraient-elles été différentes si...

C'est un roman réaliste et sensible sur l'amour fraternel qu'on lit le cœur serré avec une angoisse au creux du ventre. Un roman qui montre qu'on se construit aussi à travers les membres d'une même famille.

Retrouver le petit frère
Gisèle Bienne
Ecole des Loisirs

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