Lily

1961. Lily à 16 ans. Elle se destine à la danse. Bientôt le concours de l'Opéra de Paris. Mais depuis quelques mois, depuis le départ de son grand frère Michel, 20 ans, pour l'Algérie, elle n'est plus la même Lily. Ce grand frère adoré, qui remplace son père mort quand elle avait 5 ans, lui manque plus que tout. C'est comme une brûlure. Elle ne sait plus où elle en est, le dialogue avec sa mère est difficile. Elle voit bien qu'elle souffre elle aussi mais elles n'arrivent plus à s'atteindre mutuellement.  Et puis tous ces événements, cette guerre qu'on ne veut pas nommer, c'est difficile à comprendre. Mais Lily va devoir affronter ce monde violent et essayer d'apprivoiser cette absence et grandir en maturité.

C'est là un roman qui vous emporte d'emblée dans le Paris de cette époque avec d'un côté la politique bien difficile à cerner -quel camp choisir ?- et de l'autre une ville en pleine ébullition intellectuelle. 

Ce sont deux voix de la famille de Lily qui dans leur dialogue portent à la connaissance du lecteur cette histoire et cela rend le récit très dynamique et très proche. Le grand-père ( qui n'est autre que le cousin cinéaste de Lily) et sa petite fille qu'on devine être l'auteure elle-même adolescente. 

S'alternent également les deux voix de Lily et de Michel, l'une dans son quotidien à Paris, dans ce monde très fermé et très exigeant de la danse, l'autre en Algérie et ses désillusions face à cette guerre bien loin de ses valeurs et de ses convictions d'instituteur de la République.

On pourrait croire que l'auteure embrouille son lecteur : et bien, non, la construction est parfaitement maîtrisée et j'ai aimé ces va-et-vient entre les époques car ils démontrent qu'une famille est faite d'histoires aussi, de sa propre histoire et qu'il est important de la transmettre.

C'est un roman très riche  : sur nos choix, nos erreurs, nos résistances, nos défaillances, nos concessions, nos compromis. Ceux qu'on nous impose et ceux qu'on se choisit.
Mais c'est surtout le roman d'une jeune femme, Lily, sur son émancipation, sur sa maturité qui éclot, sur son passage à l'âge adulte.

J'en retiens une phrase de la page 200 : "Il n'y a pas de hauteur, juste le bonheur d'être soi".

De nombreuses références cinématographiques, musicales et bibliographiques le rendent aussi bien ancré dans cette époque des années 60. Et saluons au passage la très belle couverture signée Séverin Millet.

Je suis aujourd'hui très contente de ne pas être passée à côté de cette lecture, sur ce destin lumineux d'une jeune fille en devenir.


Lily
Cécile Roumiguière
La joie de lire
Encrage


Commentaires